La Gare

Assis sur un banc à la gare, à regarder les vies passer
Je me suis perdu dans ton regard, toi, qui ne semblais pas pressé·e
Le pas assuré, marchant lentement, tu semblais avoir le temps
Cheveux détachés, visage souriant, à défier l'horloge de l'argent

Ta présence au milieu de ces ombres qui se pressent d'aller nulle part
Dressé·e au milieu du nombre, tu semblais un dernier rempart
Tu aurais pu te laisser emporter par les tics-tacs, les sonneries, les fumées
Face au monde des chiffres, start-upers et banquiers qui détruisent le monde sans ciller

Collé au mur, avec son violon et ses notes qui ne voulaient faiblir
Se tenait un être et un carton qui disait "pour une pièce, ou un sourire"
Et dans la folie des courses effrénées, j'ai vu ton sourire s'étirer
Comme l'oiseau qui se rit des marées, tu t'es mis·e à danser
Et au tempo du battement de tes pieds j'ai senti la Terre s'éveiller
Dans ta joie d'étincelle libérée renaissait la solidarité

Un a un, les corps qui s'excitaient vinrent se rassembler
Par la main, sous leurs yeux stupéfaits, tu les as fait valser
Et ce grand hall pour les âmes échouées devint une salle de bal
Quand les êtres se surprennent d'exister, ils comprennent que c'est fondamental
Et la danse emmerde le Capital